Redéfinition du concept de progrès

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Bonjour à tous,


Je propose une définition du progrès extrêmement simpliste mais qui a l'avantage d'éclaircir sacrément l'horizon. Pour moi, le notion de progrès se trouve immédiatement en relation avec celle d'intérêt général, en ce sens que le progrès est ce qui s'obtient lorsque l'on poursuit l'intérêt général. Reste donc à définir l'intérêt général, et évidemment c'est là que les choses se corsent.

Il n'existe à ce jour aucune définition de l'intérêt général acceptée et reconnue par tous. Le droit Français ne donne pas une définition de l'intérêt général, bien que cette notion soit au centre du droit public il n'existe pas une définition exhaustive de l'intérêt général, la doctrine se contente de dire qu'elle est une notion évolutive, ce qui justifie la fermeture de certains services publics devenus obsolètes à notre époque comme celui des télécommunications. La constitution n'en propose pas davantage.
Pour plus d'informations sur ce point je vous renvoie ici:

http://www.conseil-etat.fr/Decisions-Avis-Publicat...

Un texte fascinant qu'on m'a fait lire en deuxième année. Ce texte est fascinant à deux titres: il reconnait le caractère central de l'intérêt général, et reconnait que la notion n'est pas clairement définie et se trouve aujourd'hui presque passée de mode.

Il me semble pourtant qu'une définition de l'intérêt général devrait se trouver dans les cinq premiers articles de notre constitution, et pas seulement dans un objectif disons déclamatoire, mais comme le fondement d'un droit subjectif, c'est à dire comme le droit de se prévaloir de l'intérêt général, par une action directe et collective. Défendre l'intérêt général ne serait qu'une défense de la constitution et là on sait faire.

On ne peut pas nier que l'intérêt général soit le lieu de toutes les confusions et de tous les conflits. Par honnêteté intellectuelle, je vous rappelle la position néo-libérale: l'intérêt général est la somme des intérêts particuliers. L'intérêt général est issu de la concurrence "libre" de tous les agents et celle lutte va faire apparaître par les gains de productivité qu'elle produit, un intérêt général. Donc selon cette tendance, la réduction de l'état a son strict minimum est une nécessité impérative puisque l'état, régulateur par définition, va distordre cette compétition.
Bien sûr, il s'agit là d'un résumé extrêmement simpliste mais je le pense juste sur le fond. Pour ma part, je trouve cette conception assez proche de la sélection naturelle de Darwin.

Heureusement, il y a la conception marxiste (ou Keynésienne) de l'intérêt général.Cette conception énonce que l'intérêt général n'est jamais réductible aux intérêts des parties. D'ailleurs, Marx avait une position assez critique sur cette notion. Il jugeait que l'intérêt général n'était qu'une arme capitaliste visant à définir un contenu de normes apparemment invariables visant à l'oppression de la classe ouvrière:
« Toute classe qui aspire à la domination doit conquérir d’abord le pouvoir politique pour représenter à son tour son intérêt propre comme étant l’intérêt général. » Karl Marx, l’Idéologie allemande. On voit à quel point cette formule est désespérante, cyclique, inéluctable.

Seulement voilà, moi non plus je n'arrive pas à donner une définition à cette notion. Elle devrait englober une composante environnementale, on aperçoit rapidement qu'il est dans notre intérêt de ne pas bousiller la planète. Elle a également un aspect politique et donc juridique, elle doit viser la protection de nos libertés, il faudrait pour ça faire mieux que la Déclaration des droits de l'Homme qui est un texte bourgeois.

Au final, il m'apparaît que la définition donnée par la doctrine administrative a raison sur un point la notion d'intérêt général est évolutive. Je pense pourtant que cette notion doit être constitutionnalisée comme les moyens de l'appliquer et de la changer. Une notion aussi centrale ne devrait pas être laissée à d'obscurs auteurs, mais rendue au débat public, par des référendums d'initiative populaire, sur son étendue, son contenu, son accessibilité. Malheureusement l'absence de mécanisme de démocratie directe dans notre société condamne ce genre de notion à un flou artistique rageant. Et c'est bien dommage, car l'intérêt général, notion constamment changeante, est, par les débats qu'elle entraîne, la meilleure façon de créer du commun, de l'homogène entre nous, par ces débats et ces débats seulement nous définissons nos valeurs communes. Bien plus, à mon avis que par une élection, puisque cette recherche est vraiment métapolitique, elle est au delà de ce qui est politique, ou plutôt, elle transforme du politique en quelque chose de plus fondamental. La nature de la politique étant la contradiction et le conflit.

J'espère que les années à venir, nous permettront de réfléchir à cette notion. J'ai d'ailleurs été fou heureux par les analyses d'Etienne pɹɐnoɥɔ sur le processus constituant, qui faisait de l'intérêt général une notion clé. Puis, fou furieux de le voir soutenir lɐɹos.