Redéfinition du concept de progrès

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Nous avons énormément avancé dans notre capacité à produire toute sorte d'artefacts, mais avons-nous suffisamment avancé dans le domaine de l'éthique pour que l'utilisation de ces artefacts soit réellement vecteur de progrès pour l'ensemble de l'humanité ?


Tu es en plein dans le noeud du problème : progrès technique et progrès éthique sont deux choses terriblement distinctes dans les faits hélas, dans l'inconscient occidental et néanmoins collectif, réunies dans le discours "scientiste" qui nous anime, nous les occidentaux, depuis deux bons siècles.

L'accès aux technologies est, pour nous, synonyme de mieux-être. L'eau courante, les égouts, le gaz de ville, l'électricité, toutes ses choses et d'autres encore, le moteur à explosion et l'imprimerie par exemple, ont bouleversé la vie des européens d'une façon (dans l'ensemble) bénéfique, au point que nous avons appris à négliger le besoin de nous interroger sur la technique et de lui faire une confiance quasi aveugle pour imposer des progrès sociétaux.

L'aveugle confiance en internet peut être un exemple frappant, beaucoup le présente comme le moyen merveilleux d'éduquer les masses et de les faire accéder au savoir. Encore faut il qu'elles sachent lire, qu'elles soient dotés des infrastructures et du matériel leur permettant d'accéder au réseau, qu'elles aient les moyens de les entretenir ou de les faire entretenir, etc. Penser qu'internet seul, sans choix assumé par la collectivité, peut "élever" l'humain revient à penser que Gutenberg a appris à lire au monde seulement en fabricant son imprimerie et à mettre de côté les luttes politiques qui furent et restent nécessaires pour que l'éducation soit ouverte au plus grand nombre.

Cette pensée parcellaire ou plutôt d'amalgame prend sa source dans le boom technique du XIX qui se poursuit encore aujourd'hui ; les avancées ont été si nombreuses et puissantes que la nécessité de penser la société est passée au second plan(1), les technologies à elles seules, par leur fabrication toujours plus rapide et leur efficacité toujours plus grande, ont permis de rêver à un monde où la technologie est l'essence des progrès, bien aidé par le capital qui pouvait en tirer d'énormes bénéfices l'amalgame est devenu confusion au point qu'aujourd'hui les gens de gauche peuvent, sans penser une seconde trahir leurs idéaux, exhorter à la construction de barrages ou à la recherche de gaz bitumeux. Pour eux ce progrès technique entrainera "mathématiquement" un progrès sociétal. (On pourrait/devrait débattre conjointement de la croissance et de ce qui s'y rattache : croissance= moins de pauvreté, moins de maladies, etc.)

(1) Le bouquin de Taguieff est truffé de fols espoirs exprimés par des vrais durs de la gauche extatiques devant le futur doré que les machines vont offrir à l'humain...


Notre civilisation en déclin n'a-t-elle pas besoin de rééquilibrer le rapport entre le matériel et, disons, le spirituel (vision du monde) pour pouvoir progresser ?

Nous avons, à minima, besoin d'accepter de nous penser en tant que collectivité et d'agir en tant que telle. De considérer les technologies et les savoir-faire comme des biens communs devant être mis au service du plus grand nombre. Cela passe sans doute par une profonde réflexion sur nous mêmes, je suis réticent à l'idée de la nommer spirituelle comme philosophique mais je la réclame tout de même.