L'Ecole des IDEes -II- Le somme de l'erratique

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L'Ecole des IDEes -II- Le somme de l'erratique O faut-il penser ? Dans quelles sphres mentales et prodigieuses faut-il accepter qu'騩volue notre rverie ? Penser est-il toujours une rverie ?

Il se mit ꪠ penser des rveries dans cet endroit dans lequel j'exerce des jeunes filles et quelques jeunes gars cette profession maudite : infirmier. Avant tout, nous allons r꠩gler son compte cette mascarade du masculin et du fminin. C'est triste de devoir se d੩battre avec des couillonnades pareilles. Il ft un temps de mon imprudence o j'affirmais que toutes les infirmi빨res sont des femmes, mme les infirmiers. J'tais imprudent, un peu provocateur et je crois que je m'exerꩧais monter l'assaut des limites d'un certain entendement humain. Que sommes-nous capable de dire de la vࠩrit et que sommes-nous capable d'entendre en ces temps que l'on se chauffe les ctes 鴠 savoir si on peut marier tous le monde, mme les homosexuels ? Je disais cela et je me marrais bien l'int꠩rieur de moi de le dire. Tous les infirmiers sont des infirmires. J'y peux quoi moi, hein ? Est-ce que c'est une vrai question 諻 ? Une vraie question c'est une question propos de laquelle on soutien que l'on n'a pas de rponse contrairement ੠ la question ordinaire laquelle nous avons la rponse que l'on veut v੩rifier chez l'autre. D'abord, c'est une affirmation que je pose ainsi parce qu'il me semble jusqu' prsent que la profession d'infirmi੨re est une profession fminine, la profession fminine par excellence et que des hommes l'exercent n'y change pas grand chose quant au fond 驠 moins de modifier substantiellement cette profession dans le sens o elle pourrait intgrer une masculinisation cons驩quente comme ce ft le cas en psychiatrie. En psychiatrie toutes les infirmires sont des infirmiers, enfin, c'먩tait ainsi avant que l'infirmerie ne prenne le pouvoir dans cette dsolation d'anormalit pour y insuffler l'essence subtile des vrais soins. Cependant, alors m驪me que j'cris mes sornettes pointent les cornettes en damier, noir et blanc. Elles finissent toujours par pointer en agitant leurs ailes et nous n'en finirons jamais de les voir pointer ainsi, de mon vivant au moins, animes de ce rythme tant appr驩ci des professeurs en mdecine. La profession d'infirmi驨re est une profession fminine et ceci n'exclue pas que des hommes la pratiquent puisque, ainsi que je l'ai appris et vu confirmer par mes lectures des œuvres de Carl Gustav Jung, l'tre humain est ambisexu骩 sur le plan psychique. Homme et femme habitent dans ce mme corps sexu par la grꩢce divine et freudienne.

Ceci, cette connaissance l de la nature intime de notre tre ne devrait-il pas પtre la base, parmi d'autres l੩ments fondamentaux de la vie psychique, de l'enseignement fait aux petits enfants comme aux grands ? Comprendre et faire comprendre que nous ne sommes pas seulement ce qu'il nous semble mais autre chose, un autre que ce corps, que cette enveloppe que le miroir rvle ?

L'image sera-t-elle bonne ? Imagines une lettre d'amour tr騨s belle, magnifique, capable de faire se pmer tous les cœurs la ronde, imagines-l⠠ si tu peux et mets-l dans une enveloppe de papier kraft ordinaire que tu as piqu ੠ ton employeur qui en a tellement, des enveloppes de papier kraft. Est-ce une enveloppe de papier kraft qui, ayant emprunt les chemins sinueux et complexes que seule la puissance administre du service des postes comprend, et encore, arrive entre les mains de la bien-aim驩e o une lettre enfivr驩e d'un absolu qui essaie de s'exprimer par l'criture ? Le lecteur avis r驩pondra : les deux ! Il n'aura pas tord mais qu'est-ce qui fera trace dans les jours et les nuits agites du couple un jour runi ? L'enveloppe kraft, au mieux comme fusionn驩e en un seul tre la lettre d'amour persistera ꠠ contenir celle-ci prcieusement conserve dans quelque endroit relativement secret ; au pire finira-t-elle dans la poubelle mais la lettre d'amour jamais ne subira les affres du temps qui passe et ses mots inoxydables resteront 驠 jamais gravs dans l'esprit de la demoiselle devenue femme et mre et grand-m騨re, infirmire qui sait, et aux jours prc詩dents son trpas celle-ci repensera encore aux mots merveilleux crits par son amant sur du papier ordinaire avec une encre qui a bien p驢li ma foi.

Ainsi de notre corps qui s'tiole alors mme que nous avons le sentiment de conserver dans notre esprit une certaine jeunesse. Le corps est autre-chose. Un bien mat骩riel qui nous contient mais qui ne nous contient pas. C'est ici que revient, dcidment insistante, la question de la limite, du bord, de ce qui conf驨re une dimension contenante quelque chose que je ne tiens pas prࠩciser tout de suite, n'tant pas bien sr que le corps, 黠 part contenir des fluides, de la merde et des substances chimiques, contienne beaucoup plus de nous. Intrieur et extrieur. C'est une dr驴le de question laquelle j'ai quelques rponses qu'il faudrait aussi donner en p੢ture aux esprits rapaces et alertes des petits enfants. Notre enveloppe kraft parcouru des kilomtres pour atteindre son amoureuse. Que contient-elle au juste ? Nous avons hਢtivement conclu qu'elle contient une lettre d'amour. Mais on a rien dit quoi ! En vrit on a rien dit quand on n'a dit que cela : elle contient une lettre d'amour. C'est impossible de contenir l'amour justement, une lettre passe. Elle contient quelque chose de l'amour qui est une expression de l'amour sans doute, on s'y risque, mais pas l'amour lui-m驪me. Je dis qu'elle contient, tracs sur du papier, des mots mis ensemble d'une manire telle qu'ils ont tous ensemble un pouvoir d'騩vocation remarquable de ce que nous considrons comme l'amour dans notre culture. Mais je dis aussi qu'elle contient, d'une faon qu'il faudrait passer un long temps 駠 dterminer, une certaine quantit d'une 驩nergie d'une certaine qualit qui est l'auteur de la lettre. En posant la lettre sur sa poitrine la jeune amoureuse, la maman, la grand-mre, la mourante, quelle f騻t infirmire ou pas, fait pn詩trer dans son me cette quantit pour elle toujours pr⩩sente, inpuisable mme, dans la lettre. C'est une 骩nergie renouvelable, comme l'nergie solaire. Si on pouvait se chauffer l'amour et remplir le r頩servoir de notre bagnole avec a ! Y'a un march potentiel l穠 ! Chut.

Il faut pour que cela marche une polarit puisque l'nergie circule entre deux p驴les. Forme sphrique du globe et de la cellule. Le naf se contentera de penser que les deux amoureux constituent ces deux p鯴les entre lesquels circule l'nergie que l'on nomme : amour. Nous devons la v頩rit de dire, dtruisant ainsi quelques croyances bien ancr驩es mais ce n'est pas grave, que l'nergie circule entre deux ples qui sont dans le m鴪me tre sphrique et non pas entre deux ꩪtres. Jacques Lacan, le philosophe, a dessin des tas de nœuds qui nous renseignent sur cet imbroglio de la relation amoureuse entre autre. Il faut se taper de lire Lacan et sa pense nodale quoi, mais ne vous y trompez pas, Lacan c'est plus rigolo que vous ne croyez, surtout si on lit l'int驩gralit des retranscriptions des sminaires et pas le truc imbuvable qu'en a fait son neveu, Gloire lui soit rendue ! La quantit驩 contenue dans la lettre est d'une nergie qui joue un rle soit de catalyseur, soit de d鴩tonateur. C'est l'histoire de la madeleine de Proust si vous voulez. La rencontre de la madeleine et du th, la premire 騩tant intentionnellement imbibe du second, constitue une opration chimique de laquelle, chez l'enfant Proust, s'allume une polarit驩 o se met en mouvement une nergie d驩j prsente dans Proust ੠ l'tat de trace, ou de potentialit. Le charbon ne se met pas 驠 brler de lui-mme, il faut l'allumer.

S'il faut allumer quelque chose quand on est formateur en soins infirmiers c'est bien l'int목rt des jeunes gens, certains sont moins jeunes, pour des enseignements qui les dportent loin de ce qu'ils croyaient connaꩮtre, ce qu'ils croyaient tres et ce qu'ils s'imaginent qu'ils vont devenir.

Et voil le danger, le risque, revenir ꠠ la science toujours, revenir au discours universitaire par orgueil, la pense ma੮trise et soluble dans une matrise, une th鮨se ou un livre bien organis mme s'il est difficile. J'ai des griefs contre l'universit骩 et contre la science. Je ne sais plus au juste pourquoi mais cette tension nerveuse qui m'habite ce sujet s'alimente aujourd'hui de ce qui fourvoie le monde dans une dimension apocalyptique. Mais je suis aussi un tre de raison et je vous rassure en me reprenant moi-mપme derechef : je n'ai pas de griefs contre l'universit ni contre la science. Il faut toujours se mfier de ce qui pointe son museau en premier vers la gamelle : les dents du chien ne sont pas le chien, ni sa langue, ni ses babines retrouss驩es. Se mfier de ce qui apparat absurdement comme le sens univoque de la tension, m鮪me si... Il faut se mfier du linaire, il nous 驩conduit, il conduit le sujet en l'loignant de la tranche. Le lin驩aire c'est ce quoi je m'efforce d'chapper, ce qui nous ali੨ne profondment, pur produit d'une raison faonn駩e par la recherche du profit maximum. La rationalit capitaliste, lentement forme par l'esprit mercantile de l'homme depuis des si驨cles a un besoin constant de la linarit, elle ne supporte pas tout ce qui ressemble 驠 la rverie et le combat sans relche, elle ne supporte pas la mꢩcanique quantique et tous ce qui ressemble au hasard et l'incertitude. Elle ne supporte ni le destin ni la danse erratique des sujets qui ne semblent pas avoir de mission sur la plante. J਩sus avait-il une mission qui s'est assez mis dos les marchands du temple pour qu'ils en veuillent son intࠩgrit physique et celle de ses ap頴tres ? L'errance est au principe de la posie mais aussi de l'mancipation, les r驩volutionnaires devraient essayer de penser cela un peu qui, pour beaucoup d'entre eux, utilisent des catgories et des modes de penser faonn駩es dans cette re interminable de l'exploitation de l'homme par l'homme. L'errance systmatique, voil詠 ce que je propose comme programme. Surveiller attentivement le surgissement toujours prompt d'une pense monofilaire et univoque ; dcaler toujours la mangeoire, inverser les propositions, tester et fomenter des coups in驩dits dans la matrice commune.

Les artistes sentent plus que les philosophes en quoi l'homme moderne est alin et 驠 quoi il l'est. Les artistes, ceux qui errent, ce mfient jusqu' l'id頩e d'en mettre le principe. Cependant que, guetts par le nihilisme de cette pens驩e d'un absolu de la ngation, ils chappent 驠 eux-mmes, devraient les artistes se souvenir d'Antonin Artaud quand au cot que peut comporter un tel choix. Les artistes savent souvent, l'intuition f껩minine, mais ils sont aussi souvent dans le tout ou rien de la tendance : ils ont des difficults avec le politique ou la politique a des difficults avec eux.

Mais vous avez vu pr驩cdemment comment la lthargie du corps ne pr驩suppose rien d'un tat quelconque de la vie psychique qu'elle rend invisible de l'extrieur. Vous avez vu comment le repos peut 驪tre aussi le contenant efficace d'une activit mentale des plus intressantes et des plus n驩cessaires. Nous avons constat aussi comment une force mal dfinie nous a pouss驩 renoncer cet ࠩtat trs fcond. Qu'est-ce 詠 dire ? De quel droit une force quelconque peut s'imposer moi de cette manire, de quel droit suis-je viol਩ et par quoi ? Une certaine conception de la valeur n'est-elle pas au principe de cet acharnement me faire sortir de ma rverie ? N'est-ce pas de cette mપme conception de la valeur que s'origine la pression qui m'interdit d'y entrer l'tat de veille ? Vous voyez comment cela se tricote ? ੇa n'est pas intressant de produire un tricot qu'une machine pourrait produire. a n'est pas int釩ressant de produire un livre qu'un ordinateur pourrait crire sans nous, les humains, et a n'est pas int駩ressant non plus de mtamorphoser les humains en agents robotiques, d'homotique, comme les autres. Sachez que je ne veux rien dire parce qu'il n'y a rien dire. Sachez que je veux 頪tre et que ce qui se passe l est autre chose qu'un discours, qu'une narration, qu'un raisonnement. Je ne suis pas un tre ઠ raisonner, non plus qu' d-raisonner, je cherche ੠ l'tre que je suis affilier un mode de rverie productrice d'une utopie dont on dira qu'elle est concrꪨte. Je ne suis que marginalement un artiste mme si je suis parfois imprudent comme je l'ai montr. Je suis imprudent par la tentation que j'ꩩprouve d'exprimenter les relations entre le dedans et le dehors, entre l'intrieur et l'ext驩rieur dont on aura compris combien je les tiens pour suspects.
Jef Kazak "en vacances"
Jean : « Il fût un temps de mon imprudence où j'affirmais que toutes les infirmières sont des femmes, même les infirmiers »

Woaw ! C'est quoi cet tsunami ? C'est impossible à lire d'un seul coup, donc je propose de m'y attaquer par morceau.

Ce que tu dis là, me fait penser à la problématique de la ten...
Jean
Un tsunami ? vil flateur. Les pages de blog, c'est fait pour non ?
Jef Kazak "en vacances"
J'espère qu'il sera fertile et non dévastateur sur mon esprit chancelant sous le poids de ma folie.
Jean
Vous me génez !
Lucrèce
Et comme nous sommes tous des poussières d'étoiles, nul besoin de poser une image supposée ou non sur l'autre, parce qu'au delà des apparences il y a un peu de nous en lui et de lui en nous.
Une belle synthèse toute en sagesse!

Oui, la nature humaine est complexe et ne tient pas en une enveloppe Kra...
Jean
Allez, j'ai mis un peu d'air sous les ailes de mon texte. Vole-t-il mieux ainsi Lucrèce ?
Lucrèce
Oh ouiiii! C'est vraiment bien! Et puis ça met en évidence certaines idées sur lesquelles on aurait pu passer un peu trop vite en première lecture. Bravo! Je note au passage ta belle ouverture d'esprit qui rejoint bien ce que ton texte nous laissait entrevoir de toi. Smile
Jef Kazak "en vacances"
C'est mieux Octave Smile
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